9 juillet 2020 -- Du COVID-19 ¨¤ la perturbation du climat, de l¡¯injustice raciale ¨¤ l¡¯aggravation des in¨¦galit¨¦s, notre monde est dans la tourmente.

Dans le m¨ºme temps, nous sommes une communaut¨¦ internationale avec une vision durable, inscrite dans la Charte des Nations Unies, dont nous comm¨¦morons cette ann¨¦e le 75¨¨me anniversaire. Cette vision d¡¯un avenir meilleur, fond¨¦ sur les valeurs d¡¯¨¦galit¨¦, de respect mutuel et de coop¨¦ration internationale, nous a permis d¡¯¨¦viter une Troisi¨¨me Guerre mondiale, qui aurait eu des cons¨¦quences catastrophiques pour la vie sur la plan¨¨te.

Notre d¨¦fi commun est de canaliser cet esprit collectif et de nous montrer ¨¤ la hauteur de cette ¨¦preuve.

La pand¨¦mie a mis ¨¤ nu des in¨¦galit¨¦s graves et structurelles, tant entre les pays qu¡¯¨¤ l¡¯int¨¦rieur de chacun d¡¯entre eux. De fa?on plus g¨¦n¨¦rale, elle a mis en ¨¦vidence les vuln¨¦rabilit¨¦s du monde, non seulement face ¨¤ une nouvelle urgence sanitaire, mais aussi dans notre intervention chancelante face ¨¤ la crise climatique, ¨¤ l¡¯anarchie dans le cyberespace et aux risques de prolif¨¦ration nucl¨¦aire. Les gens, partout, perdent confiance dans la classe politique et dans les institutions politiques.

Cette urgence est aggrav¨¦e par plusieurs autres crises humanitaires profondes : des conflits qui se prolongent, voire s¡¯intensifient ; un nombre record de personnes contraintes de fuir leur foyer ; des essaims de criquets en Afrique et en Asie du Sud ; la s¨¦cheresse imminente en Afrique et en Am¨¦rique centrale ; tout cela dans un contexte de mont¨¦e des tensions g¨¦opolitiques.

Face ¨¤ ces vuln¨¦rabilit¨¦s, les chefs d¡¯?tat et de gouvernement doivent faire preuve d¡¯humilit¨¦ et saisir l¡¯importance fondamentale d¡¯¨ºtre unis et solidaires.

La pand¨¦mie, dans toute son horreur, doit ¨ºtre une piq?re de rappel, qui pousse tous les responsables politiques ¨¤ comprendre qu¡¯il convient de changer de logiciel, et que la division est un danger g¨¦n¨¦ralis¨¦.

Personne ne peut pr¨¦dire l¡¯avenir, mais je vois deux sc¨¦narios possibles.

Premi¨¨rement, l¡¯option ? optimiste ?.

Dans ce cas, le monde s¡¯en sortirait vaille que vaille. Les pays de l¡¯h¨¦misph¨¨re nord pourraient concocter une strat¨¦gie de sortie r¨¦ussie. Les pays en d¨¦veloppement recevraient une aide suffisante et leurs caract¨¦ristiques d¨¦mographiques ¨C ¨¤ savoir la jeunesse de leur population ¨C aiderait ¨¤ juguler l¡¯impact.

Un vaccin pourrait voir le jour, disons dans les neuf prochains mois, et serait distribu¨¦ comme un bien public mondial, un ? vaccin du peuple ?, qui serait disponible et accessible ¨¤ tous.

Si tel est le cas et que l¡¯¨¦conomie red¨¦marre progressivement, nous pourrions nous diriger vers une sorte de normalit¨¦ d¡¯ici deux ¨¤ trois ans.

Un deuxi¨¨me sc¨¦nario, plus sombre, risque n¨¦anmoins de se produire, si les pays ne parviennent pas ¨¤ coordonner leur action. Le virus recommence ¨¤ se propager par vagues. Le monde en d¨¦veloppement conna?t une explosion. La mise au point d¡¯un vaccin tarde. Ou encore, un vaccin est rapidement ¨¦labor¨¦, fait l¡¯objet d¡¯une concurrence acharn¨¦e et les pays les plus puissants sur le plan ¨¦conomique y ont acc¨¨s en premier, laissant les autres derri¨¨re.

Dans ce sc¨¦nario, nous pourrions assister ¨¤ une aggravation des divisions, du populisme et de la x¨¦nophobie. On pourrait voir des pays faire cavalier seul ou au contraire former des coalitions dites de bonne volont¨¦ ¨¤ r¨¦gler tel ou tel probl¨¨me. Au bout du compte, le monde serait incapable de mobiliser le type de gouvernance requise pour r¨¦pondre aux d¨¦fis communs.

Il pourrait en r¨¦sulter une d¨¦pression mondiale, qui pourrait durer de cinq ¨¤ sept ans, avant qu¡¯une nouvelle normalit¨¦, dont il est impossible de pr¨¦dire la nature, n¡¯¨¦merge.

Il est tr¨¨s difficile de savoir dans quelle direction nous allons. Nous devons faire de notre mieux et nous pr¨¦parer au pire.

La pand¨¦mie, dans toute son horreur, doit ¨ºtre une piq?re de rappel, qui pousse tous les responsables politiques ¨¤ comprendre qu¡¯il convient de changer de logiciel, et que la division est un danger g¨¦n¨¦ralis¨¦.

Cette conception permettrait de faire comprendre ¨¤ tous que la seule fa?on de rem¨¦dier aux vuln¨¦rabilit¨¦s mondiales est de mettre en place des m¨¦canismes de gouvernance mondiale plus solides, gr?ce ¨¤ la coop¨¦ration internationale.

Apr¨¨s tout, nous ne pouvons pas nous contenter de renouer simplement avec les syst¨¨mes qui ont engendr¨¦ la crise actuelle. Il nous faut construire en mieux, avec des soci¨¦t¨¦s et des ¨¦conomies plus durables, plus inclusives et plus ¨¦galitaires entre les genres.

Ce faisant, il nous faut repenser la fa?on dont les nations coop¨¨rent. Le multilat¨¦ralisme d¡¯aujourd¡¯hui manque d¡¯envergure, d¡¯ambition et de mordant, et certains instruments qui ont les moyens de mordre ne manifestent gu¨¨re d¡¯app¨¦tit, comme l¡¯ont montr¨¦ les difficult¨¦s rencontr¨¦es par le Conseil de s¨¦curit¨¦.

Il nous faut un multilat¨¦ralisme en r¨¦seau, dans lequel l¡¯Organisation des Nations Unies et les organismes du syst¨¨me des Nations Unies, la Banque mondiale et le Fonds mon¨¦taire international, les organisations r¨¦gionales comme l¡¯Union africaine et l¡¯Union europ¨¦enne, les organisations de commerce international et d¡¯autres coop¨¨rent plus ¨¦troitement et plus efficacement.

Il nous faut ¨¦galement un multilat¨¦ralisme plus inclusif. De nos jours, les gouvernements sont loin d¡¯¨ºtre les seuls partenaires en termes de politique ou de pouvoir. La soci¨¦t¨¦ civile, le monde des affaires, les autorit¨¦s locales, les villes et les administrations r¨¦gionales jouent un r?le de plus en plus pr¨¦¨¦minent dans le monde actuel.

Cela aura pour r¨¦sultat un multilat¨¦ralisme plus efficace, dot¨¦ des m¨¦canismes dont il a besoin pour disposer d¡¯une gouvernance mondiale effective lorsque cela est n¨¦cessaire.

Un nouveau multilat¨¦ralisme en r¨¦seau efficace, fond¨¦ sur les valeurs p¨¦rennes de la Charte des Nations Unies, pourrait nous sortir de notre ¨¦tat de torpeur et freiner notre glissement vers un danger toujours plus grand.

Les responsables politiques du monde entier doivent tenir compte de cette piq?re de rappel et se mobiliser pour rem¨¦dier aux vuln¨¦rabilit¨¦s dans le monde, renforcer la capacit¨¦ de gouvernance mondiale, donner du mordant aux institutions multilat¨¦rales et mettre ¨¤ profit le pouvoir que conf¨¨rent l¡¯unit¨¦ et la solidarit¨¦ afin de surmonter la plus grande ¨¦preuve de notre ¨¦poque.