22 mai 2020 ¡ª 2020 devait ¨ºtre une ann¨¦e charni¨¨re pour l¡¯action climatique et la pr¨¦servation de la biodiversit¨¦. La pand¨¦mie de COVID-19 en a d¨¦cid¨¦ autrement, entra?nant le report de tous les rendez-vous internationaux sur l¡¯environnement. Les Nations Unies maintiennent n¨¦anmoins le cap et ajustent ce calendrier crucial pour la d¨¦fense des ¨¦cosyst¨¨mes, tout en tirant d¡¯ores et d¨¦j¨¤ des enseignements utiles de cette crise sanitaire mondiale.

Pr¨¦vue initialement ¨¤ l¡¯automne en Chine, la quinzi¨¨me conf¨¦rence des parties ¨¤ la , ¨¦galement appel¨¦e COP15 Biodiversit¨¦, doit d¨¦sormais se tenir en 2021. Les r¨¦unions pr¨¦paratoires ont ¨¦t¨¦ d¨¦cal¨¦es pour permettre la tenue de ce sommet d¡¯autant plus attendu qu¡¯il doit fixer un nouveau cadre mondial pour la biodiversit¨¦, avec pour objectif phare de prot¨¦ger 30% de la plan¨¨te dans les dix ans ¨¤ venir.

? l¡¯approche de la , l¡¯ONU soutient que les efforts d¨¦ploy¨¦s par la communaut¨¦ mondiale pour se relever du bouleversement actuel et atteindre les Objectifs de d¨¦veloppement durable qu¡¯elle s¡®est fix¨¦e ¨¤ l¡¯horizon 2030 doivent imp¨¦rativement inclure la protection de la biodiversit¨¦.

? Pour att¨¦nuer les d¨¦r¨¨glements climatiques, garantir la s¨¦curit¨¦ alimentaire et en eau, voire pr¨¦venir les pand¨¦mies, il est essentiel de pr¨¦server la biodiversit¨¦ et de la g¨¦rer de mani¨¨re durable ?, a fait valoir le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral de l¡¯Organisation, Ant¨®nio Guterres, ¨¤ l¡¯occasion de la Journ¨¦e internationale de la diversit¨¦ biologique, c¨¦l¨¦br¨¦e ce vendredi.

? ? mesure que nous empi¨¦tons sur la nature et que nous ¨¦puisons les habitats vitaux, le nombre d¡¯esp¨¨ces en danger ne cesse de cro?tre ?, a constat¨¦ le chef de l¡¯ONU.  Or, la COVID-19, qui est ? issue de la nature ?, a montr¨¦ ? ¨¤ quel point la sant¨¦ humaine est intimement li¨¦e ¨¤ notre relation avec le monde naturel ?.

Pr¨¦server l¡¯int¨¦grit¨¦ des ¨¦cosyst¨¨mes pour pr¨¦venir les zoonoses

Un avertissement relay¨¦ par Inger Andersen, Directrice ex¨¦cutive du , qui que 75 % des maladies infectieuses ¨¦mergentes - le virus Ebola, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS), le virus Nipah, la fi¨¨vre de la vall¨¦e du Rift, le syndrome respiratoire aigu soudain (SRAS), le virus du Nil occidental, la maladie virale de Zika et, maintenant, la COVID-19 - sont des , c¡¯est-¨¤-dire des affections transmissibles des animaux ¨¤ l¡¯homme, et inversement.

L'¨¦pid¨¦mie d'Ebola, en Afrique de l'Ouest, a ¨¦t¨¦ le r¨¦sultat de pertes foresti¨¨res qui ont entra?n¨¦ des contacts plus ¨¦troits entre la faune sauvage et les ¨¦tablissements humains, le PNUE. L'¨¦mergence de la grippe aviaire et du virus Nipah est, elle, li¨¦e ¨¤ l¡¯¨¦levage intensif d¡¯animaux : les volailles pour la premi¨¨re, les porcs pour la seconde. Quant ¨¤ la COVID-19, l¡¯ juge vraisemblable que le virus se soit transmis de la chauve-souris ¨¤ l¡¯homme par l¡¯entremise d¡¯un animal h?te pr¨¦sent dans un march¨¦ ¨¤ Wuhan, en Chine.

? Il n'y a jamais eu auparavant autant de possibilit¨¦s de transmission d'agents pathog¨¨nes des animaux sauvages et domestiques ¨¤ l'homme ?, souligne Mme Andersen. De fait, pr¨¦vient-elle, ? si nous n¡¯agissons pas pour prot¨¦ger I¡¯habitat et enrayer la perte de biodiversit¨¦, les pand¨¦mies pourraient devenir une nouvelle normalit¨¦ au cours de ce si¨¨cle ?.

Selon le PNUE, les changements environnementaux induits par l¡¯homme, qu¡¯il s¡¯agisse de l¡¯exploitation intensive de la terre, de la d¨¦forestation, de la pollution ou du changement climatique, modifient la structure des populations d'animaux sauvages et r¨¦duisent la biodiversit¨¦.  Ce faisant, ils cr¨¦ent de nouvelles conditions environnementales qui favorisent des h?tes, des vecteurs et des agents pathog¨¨nes particuliers.

est donc urgent de pr¨¦server l¡¯int¨¦grit¨¦ des ¨¦cosyst¨¨mes, ne serait-ce que pour r¨¦guler les maladies. Il convient, pour cela, de favoriser la diversit¨¦ des esp¨¨ces, de sorte qu'il soit plus difficile pour un pathog¨¨ne de se r¨¦pandre, de s'amplifier ou de devenir dominant, indique l¡¯agence onusienne.

G¨¦rer sainement les d¨¦chets m¨¦dicaux et chimiques

Dans ses ¨¤ la COVID-19, le PNUE se projette dans l¡¯apr¨¨s-crise et appelle les ?tats Membres ¨¤ ? reconstruire en mieux ?, notamment en facilitant la transition vers la neutralit¨¦ carbone et en cr¨¦ant des emplois ? verts ?. Il insiste aussi sur l¡¯importance pour la biodiversit¨¦ d¡¯une gestion saine des d¨¦chets m¨¦dicaux et chimiques.

Alors que l¡¯humanit¨¦ enti¨¨re est aux prises avec le coronavirus, la plan¨¨te subit les cons¨¦quences n¨¦fastes d¡¯une tr¨¨s forte augmentation des d¨¦chets dangereux, tels que les ¨¦quipements de protection individuelle (EPI), les produits pharmaceutiques, les eaux us¨¦es et les d¨¦tergents, d¨¦sinfectants et autres solutions antimicrobiennes utilis¨¦s massivement. Ces rejets peuvent entra?ner une pollution de l¡¯¨¦cosyst¨¨me, voire contribuer ¨¤ la propagation d¡¯infections.

Si 75 ¨¤ 90 % des d¨¦chets produits par les ¨¦tablissements de sant¨¦ sont d¨¦pourvus de risques, une partie non n¨¦gligeable des autres d¨¦chets sont susceptibles de contenir des agents pathog¨¨nes en concentration suffisante pour provoquer des maladies chez les h?tes sensibles, Keith Alverson, directeur du Centre international de technologie de l¡¯environnement du PNUE, ¨¤ l¡¯origine d¡¯un sur le traitement et la destruction des d¨¦chets li¨¦s aux soins de sant¨¦.

Face ¨¤ cet enjeu de durabilit¨¦ environnementale, l¡¯agence s¡¯emploie ¨¤ sensibiliser les agents de sant¨¦ ¨¤ la gestion des d¨¦chets li¨¦s ¨¤ la COVID-19, en se concentrant particuli¨¨rement sur l¡¯utilisation rationnelle et circulaire des ressources. Plus largement, elle aide les pays ¨¤ renforcer leurs capacit¨¦s en la mati¨¨re afin d¡¯incorporer des strat¨¦gies de gestion des d¨¦chets en p¨¦riode de pand¨¦mie dans leurs plans de pr¨¦paration et de r¨¦ponse aux crises.

Prot¨¦ger les pollinisateurs

La pollinisation est essentielle pour la pr¨¦servation de la biodiversit¨¦ et la survie de l¡¯humanit¨¦ car d¡¯elle d¨¦pendent la reproduction des plantes sauvages et la s¨¦curit¨¦ alimentaire. En effet, 90 % des plantes ¨¤ fleurs sauvages dans le monde et plus d¡¯un tiers des fruits, des noix et des graines dont se nourrissent les humains ont pour origine l¡¯activit¨¦ de pollinisation des abeilles et autres insectes pollinisateurs.

Comme le Jamison Ervin, en charge du programme mondial sur la nature pour le d¨¦veloppement au sein du , notre syst¨¨me alimentaire mondial, mis ¨¤ mal par la crise actuelle, est particuli¨¨rement vuln¨¦rable ¨¤ la perte de biodiversit¨¦ : ? si nos pollinisateurs disparaissent, il en va de m¨ºme pour 35 % de nos cultures mondiales ?. Face ¨¤ un million d'esp¨¨ces menac¨¦es d'extinction, ? nous nous devons de renforcer et consolider les ¨¦cosyst¨¨mes naturels ?, plaide-t-elle.

Si le ralentissement des activit¨¦s humaines du fait des restrictions li¨¦es ¨¤ la COVID-19 a offert aux abeilles un peu de r¨¦pit, l¡¯existence de ces insectes reste menac¨¦e par le fractionnement de leur habitat, le d¨¦veloppement de l¡¯agriculture intensive en monoculture et l¡¯utilisation croissante des pesticides, autant de facteurs qui favorisent la perte de biodiversit¨¦ et l¡¯¨¦mergence des zoonoses.

 

 

Ces questions alimentent les travaux du , institu¨¦ en 1971 par l¡¯, pour am¨¦liorer les moyens de subsistance des populations et sauvegarder les ¨¦cosyst¨¨mes naturels et g¨¦r¨¦s. Dans le cadre d¡¯un partenariat entre le MAB et le groupe LVMH, l¡¯agence onusienne s¡¯est associ¨¦e en octobre dernier ¨¤ la soci¨¦t¨¦ Guerlain pour former des apiculteurs et valoriser leur savoir-faire.

Profitant de la Journ¨¦e mondiale des abeilles, le 20 mai, l¡¯UNESCO a que la formation de la premi¨¨re promotion d¨¦buterait en avril 2021, le projet ayant d? ¨ºtre report¨¦ d¡¯un an en raison du contexte pand¨¦mique. Ses modalit¨¦s restent toutefois inchang¨¦es, en particulier l¡¯accueil des apprentis dans le de l¡¯agence.

De son c?t¨¦, l¡¯ a souhait¨¦ mettre en lumi¨¨re l¡¯impact de la COVID-19 sur le secteur apicole lors d¡¯un organis¨¦ ce m¨ºme jour avec Aleksandra Pivec, ministre slov¨¨ne de l¡¯agriculture, Tang Huajun, pr¨¦sident de l¡¯Acad¨¦mie chinoise des sciences agricoles (CAAS), et Jeff Pettis, pr¨¦sident de la F¨¦d¨¦ration internationale des associations d¡¯apiculteurs (Apimondia). Au centre des discussions : les effets de la pand¨¦mie sur la production de miel et les moyens de subsistance des apiculteurs.

Relancer l¡¯¨¦cotourisme

Aussi paradoxal que cela puisse para?tre, la biodiversit¨¦ b¨¦n¨¦ficie aussi du tourisme, au moins dans les pays o¨´ la participation communautaire contribue aux efforts de conservation de la faune. En Namibie, par exemple, cette activit¨¦ est principalement ax¨¦e sur la nature et s¡¯affirme, avec 15,4 % de l'emploi total et 14,7 % du PIB national, comme le deuxi¨¨me secteur ¨¦conomique du pays, selon le PNUD.

Dans ce pays d¡¯Afrique australe, 20 % des terres accueillent 86 r¨¦serves naturelles abritant des ¨¦l¨¦phants, des lions ainsi que la plus grande concentration mondiale de rhinoc¨¦ros noirs et de gu¨¦pards. Pour les communaut¨¦s environnantes, cette riche biodiversit¨¦ est facteur d¡¯emplois et de revenus. Les braconniers eux-m¨ºmes sont devenus des protecteurs de la faune.

La COVID-19 a mis un coup d¡¯arr¨ºt ¨¤ cette dynamique. La fermeture des fronti¨¨res et le confinement ont entra?n¨¦ une perte de 3,2 millions de dollars de recettes pour le tourisme local, qui se r¨¦percute sur les salaires du personnel des r¨¦serves. Des dizaines de milliers d¡¯emplois sont menac¨¦s, de m¨ºme que ? trois d¨¦cennies d¡¯efforts de conservation communautaire ?, Midori Paxton, chef des ¨¦cosyst¨¨mes et de la biodiversit¨¦ au PNUD.

? Une augmentation du braconnage a ¨¦t¨¦ d¨¦j¨¤ signal¨¦e dans ces m¨ºmes communaut¨¦s qui ont perdu leur emploi. Et nous voil¨¤ revenus ¨¤ la source du probl¨¨me : la perte de la biodiversit¨¦ et le trafic d'esp¨¨ces sauvages sont ¨¤ l'origine de l'¨¦mergence de maladies infectieuses li¨¦es aux animaux, telles que les coronavirus ?, analyse l¡¯experte, qui appelle ¨¤ soutenir d¡¯urgence le secteur de l¡¯¨¦cotourisme ? compte tenu de son immense contribution ¨¤ la r¨¦duction de la pauvret¨¦ et ¨¤ la conservation de la faune ?.

? Cette pand¨¦mie affecte directement et s¨¦rieusement au moins 100 millions de personnes qui d¨¦pendent de l'¨¦cotourisme. Un vrai soutien est n¨¦cessaire pour ce secteur, et pas seulement pour les compagnies a¨¦riennes, les grandes exploitations agricoles et les soci¨¦t¨¦s ?, ajoute Mme Paxton, alors que l¡¯ table d¨¦sormais sur une de 58 % ¨¤ 78 % des voyages internationaux cette ann¨¦e.

Inclure cet investissement dans les plans de rel¨¨vement serait, ¨¤ ses yeux, b¨¦n¨¦fique pour le d¨¦veloppement durable, la sauvegarde des ¨¦cosyst¨¨mes et l¡¯¨¦conomie. ? Une nature en bonne sant¨¦ nous fournit l'air, l'eau et la nourriture, autant de vaccins naturels qui diminuent la fr¨¦quence et l'intensit¨¦ des futures ¨¦pid¨¦mies ?, assure-t-elle. ? De quoi ¨¦conomiser des milliards de dollars au cours des prochaines d¨¦cennies et ¨¦viter la mis¨¨re pour autant de personnes ?.